Le concept de jeu responsable (JR) a été longtemps utilisé pour aider les individus à contrôler leur comportement de jeu et ainsi réduire les méfaits associés. Cependant, selon un article de Charles Livingstone et Angela Rintoul, publié en 2020, ces programmes ne parviennent pas à atteindre leur objectif principal. Les auteurs soutiennent que l'approche de jeu responsable doit être abandonnée au profit d'une stratégie de santé publique plus large pour prévenir et minimiser les méfaits du jeu.
Les programmes de jeu responsable reposent sur l'idée que les individus sont responsables de leur propre comportement de jeu. Toutefois, cette approche présente plusieurs lacunes. Premièrement, elle ne prend pas en compte les caractéristiques sociales, environnementales et commerciales qui rendent les jeux de hasard dangereux. De plus, il existe peu de preuves pour soutenir l'efficacité réelle des programmes de JR dans la réduction des méfaits du jeu.
Ces programmes se concentrent souvent sur les individus déjà affectés par le jeu problématique, au lieu de prévenir l'apparition de ces comportements. Cette focalisation sur les individus, plutôt que sur les facteurs externes, permet à l'industrie du jeu de maintenir le statu quo tout en donnant l'impression que des mesures sont prises pour atténuer les risques.
Livingstone et Rintoul préconisent une approche de santé publique qui viserait à améliorer la santé de la population dans son ensemble. Contrairement aux programmes de JR, une telle approche s'attaque aux causes profondes de l'addiction au jeu. Elle prend en compte les aspects addictifs des produits tels que le jeu, le tabac et l'alcool, et cherche à prévenir et réduire les méfaits qu'ils peuvent engendrer.
Une stratégie de santé publique ne se contente pas de traiter les symptômes du jeu problématique. Elle met l'accent sur la prévention des méfaits dès le départ et propose des options de traitement pour les personnes déjà affectées. En outre, cette approche examine comment l'environnement social, les caractéristiques des jeux de hasard, ainsi que le marketing et la publicité peuvent inciter les individus à jouer.
Les auteurs recommandent que les décideurs politiques développent des programmes de prévention basés sur des preuves issues des activités de santé publique et des recherches sur les politiques de jeu. Par exemple, au Royaume-Uni, la réduction en 2019 de la mise maximale sur les terminaux de jeu à cotes fixes (FOBT) de 100 £ à 2 £ est un exemple concret d'une politique efficace inspirée par une approche de santé publique.
En outre, Livingstone et Rintoul suggèrent qu'il est crucial d'empêcher l'industrie du jeu de financer la recherche sur le jeu, afin d'éviter tout conflit d'intérêts qui pourrait biaiser les résultats.
Les programmes de jeu responsable, tels qu'ils existent aujourd'hui, ne sont pas suffisants pour protéger les individus des dangers du jeu. Il est impératif de les remplacer par une approche de santé publique qui aborde les véritables causes des méfaits du jeu et qui offre des solutions de prévention et de traitement efficaces. Pour ce faire, les décideurs doivent s'appuyer sur des preuves solides et s'inspirer des succès passés dans les domaines de la politique sur l'alcool et le tabac.